• 2 commentaires
  • [Extrait d'une grammaire pour les vivants de David Cooper.]
    Je voudrais mettre l'accent sur le fait que le LSD (1) n'est pas un raccourci commode vers l'expérience mystique ou vers le travail qui est fait en psychanalyse (quand il atteint, ce qui est rare, la qualité d'un échange thérapeutique non aliéné) - travail qui se trouve largement produit en dépit du contexte formel de la psychanalyse. L'expérience du LSD est à des années-lumière de l'expérience psychanalytique. Il faut un travail spirituel très dur pour acquérir la discipline de l'expérience avant de pouvoir naviguer en de nouveaux endroits hors de l'espace et du temps. Il peut donc être utile de définir à présent les conditions d'un bon voyage :
    1. Le voyage doit se faire dans un lieu familier et confortable.
    Inutile de dire que c'est extrêmement difficile dans une clinique ou dans tout autre établissement médical.
    2. Le choix du moment de la vie où l'on peut s'embarquer pour un tel voyage demande beaucoup d'expérience. Disons simplement que le LSD n'est pas un produit à prendre dans des moments difficiles ou pour résoudre des crises. On doit être prêt à un changement capital dans sa vie et, en même temps, avoir un système automatique, presque routinier, d'activité, pour survivre dans le monde au grand ralenti, avec trois jours libres devant soi pour le voyage. et le retour - pas de décisions pratiques à prendre immédiatement, ni de problèmes exigeants ou aliénants, par exemple.
    3. Le voyage doit être effectué en compagnie d'une personne connaissant déjà l'usage du LSD et capable de participer pleinement à l'expérience (tandis qu'une autre personne dans la maison ne prend pas d'acide mais se charge d'écarter tout ce qui peut interférer de manière gênante avec le voyage, comme la sonnette d'entrée ou le téléphone, au moins pendant les huit heures les plus importantes du voyage). L'autre personne qui prend de l'acide, le “guide”, devra être assez calme pour ne pas essayer d'interrompre de manière prématurée le prétendu “mauvais voyage” qu'on peut faire en ayant recours à la chlorpromazine (largactil, thorazine), etc. : aucun voyage n'est “mauvais” à moins d'être avorté du fait d'une mauvaise interférence. Les expériences sinistres et horrifiantes deviennent supportables si on leur donne le contexte qui convient, et peuvent être intégrées aux “bonnes” expériences.
    Je me rends compte que les propositions que j'énonce ici sont à l'heure actuelle illégales en de nombreux pays. Ces pays feraient bien de se mettre à la page politiquement. En particulier, celui que j'appelle le guide du voyage est une personne qui a expérimenté l'acide. (et sa propre folie). Ce n'est pas un professionnel (un médecin par exemple) pour la simple raison que le “métier d'être une personne” n'est pas, par principe, une carrière possible. Malgré quoi, en Angleterre, le LSD ne peut être légalement administré que par des médecins.
    Aux États-Unis, il y a une Administration fédérale des aliments et des drogues. De même qu'on forme des contre-gouvernements, je propose qu'on forme une Autorité fédérale (et plus tard internationale) spirituelle des aliments et des drogues, qui renverserait bien des barrières répressives. Le LSD et les substances qui lui ressemblent peuvent être considérés, de manière mieux appropriée, comme des aliments, et comme avec tout aliment, une certaine mesure de régime est nécessaire: et, dans l'état actuel de notre civilisation, il se peut que nous ayons besoin d'être bien guidés en ce qui concerne tant le choix des aliments que nous ingérons que le moment pour ce faire, car nous avons depuis longtemps oublié ce qui est “bon” pour nous. Les aliments, toutefois, sont essentiellement des supports de la vie, tandis que parmi les drogues certaines substances détruisent nos corps et restreignent notre expérience, telles l'héroïne, l'alcool, les barbituriques, les amphétamines, sans parler de l'usage massif, aveugle, qu'on fait d'autres poisons dans les “traitements” psychiatriques. Il est probable que dans le monde industriel aussi bien que dans le Tiers Monde, l'usage du cannabis peut avantageusement rester illégal: on gagne en retour un accroissement de la mobilisation du potentiel révolutionnaire et du nombre de sujets gagnés par la “paranoïa” (c'est-à-dire la vigilance) requise à propos d'interventions policières ; vigilance utile pour d'autres activités. Il faut aussi tenir compte du fait : souligné par Frantz Fanon, que le cannabis peut retarder l'action révolutionnaire. Le LSD, pris par certaines personnes au bon moment et dans le bon contexte, peut mobiliser plus profondément le potentiel révolutionnaire : notamment en ce qui concerne la familiarisation avec les espaces posthumes, qui peut préparer aux risques qu'un révolutionnaire est susceptible de courir. Un jour final, en révolutionnant notre “chimie psychique” et nos vies, nous n'aurons plus besoin de substances comme le LSD. Pour l'instant, dans la société pré-révolutionnaire, l'usage prudent de telles substances par certaines personnes, dans des conditions strictement observées, peut faciliter une revolution personnelle, qui elle-même peut être intégrée dans le contexte plus large de la libération de la société.

    A Suivre...
    Si quelqu'un dispose du Mandala de 1968, livre collectif faisant le tour du LSD dans le cadre experimental, artistique, spirituel, etc. Merci de m'en faire parvenir une version numériser.
    Attention entre autre en raison des flashback, il est conseillé de préféré la Salvia Divinorum au Lsd. http://mastekush.ovh.org/drogue/salvia.htm
    Attention la salvia n'est pas une drogue recreative : http://www.sagewisdom.org/guidefrancais.html
    Un petit rappel également pour faire un voyage psychédélique, je conseillerais de ne pas avoir d'attaches, car quand on fait un looping et qu'on reste attaché, on ne retombe pas forcement sur ses pieds...


    (1) Quoique certaines substances "psychédéliques" comme le LSD aient un pouvoir puissant de "destructuration", ce n'est pas avec une ampoule ou avec une pilule qu'on peut découvrir les besoins radicaux, mais seulement par l'action politique. Les conditions et le contexte que j'ai précédemment définis pour prendre du LSD sont si rigoureux que celui-ci ne peut pas être recommandé _ et certainement pas dans le chaos de la situation politique européenne. Il y a trop de prétendues folies dans tout cela, et le problème est de les éviter ; mieux vaut faire l'amour, orgasmiquement, et faire naître la révolution sociale, activement. Pour ce qui est des substances douces, comme le cannabis, les lois sociales contre sa possession doivent être abrogées. Mais il ne représente pas une grande libération de notre expérience, spécialement tant qu'il est inextricablement lié aux capitalistes de la mafia des drogues dures. Il n'y a pas de libération dans un morceau de haschich. Ce qui est vrai, en revanche, c'est que nous nous heurtons, ici, à la légalité bourgeoise en tant que telle : par qu'elle hypocrisie déclare-t-elle illégale la mafia internationale de la drogue, et légale la mafia des compagnies multinationales ?

    5 commentaires


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique